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Le bouddhisme, malgré la sympathie qu’il suscite, demeure aux yeux du grand public une spiritualité aux contours flous... Comment s'y retrouver parmi la diversité des courants et des écoles, et le foisonnement de concepts peu familiers ? Le bouddhisme de Nichiren, en particulier, a de quoi bouleverser toutes les idées reçues ! Petit tour d’horizon.

Idée reçue n°1 : “Le bouddhisme n’est pas une religion, mais une philosophie.”

Parce qu’il met l’accent sur la sagesse et qu’il ne postule pas la croyance en dieu mais est entièrement centré sur l’être humain, le bouddhisme peut sembler tenir davantage d'une philosophie que d'une religion. Et pourtant, sa démarche est essentiellement religieuse : la prière, ou pratique spirituelle ; des rites (vœux d’engagement bouddhique, cérémonies de mariage, pour les défunts, etc.) ; un objet de culte ; et surtout, la primauté accordée à la foi.

La foi, en particulier, est définie comme le facteur décisif permettant à une personne d’éveiller sa nature de bouddha inhérente. Ainsi, dans le Sûtra du Lotus, Shakyamuni déclare à Shariputra, disciple pourtant réputé pour sa sagesse :

Même toi, Shariputra, tu n’as pu, en ce qui concerne ce Sûtra, y accéder que grâce à ta foi.
SdL-III, 87-88.

De même, Nichiren Daishonin, à travers toutes ses lettres, revient constamment sur l'importance de la foi.
Même si l’on peut aborder le bouddhisme de manière intellectuelle, dans sa dimension philosophique, sa vocation première est bien celle d’être une voie de transformation intérieure, fondée sur la foi.


Idée reçue n°2 : “Les bouddhistes vénèrent le Bouddha comme un dieu.”

Shakyamuni, le Bouddha historique, était simplement un être humain. Au terme d’une quête spirituelle ardente, il s’éveilla à la réalité ultime de la vie, puis entreprit d’exposer un enseignement permettant à tous de parvenir au même éveil que lui.

Il ne se posa toutefois jamais en être supérieur, mais simplement en guide spirituel et “ami de bien”, recherchant à mettre chaque personne sur la voie d’un bonheur et d’une autonomie authentiques. Cet esprit d’égalité fondamentale trouve sa plus grande expression dans le Sûtra du Lotus, où le Bouddha déclare :

Dans l’espoir de rendre toutes les personnes égales à moi-même, sans aucune distinction entre nous.
SdL-II, 54.

Après sa mort cependant, une tendance à le “mythifier” apparut au sein de la communauté des disciples.
Plus tard, dans le Japon du XIIIe siècle, observant que cette tendance avait fini par créer une distance insurmontable avec le Bouddha dans l’esprit des personnes ordinaires, Nichiren Daishonin prôna un retour à “Shakyamuni l’être humain”. En réformateur religieux, il soutenait avec ferveur que la Loi à laquelle le Bouddha s’était éveillé n’existe nulle part ailleurs que dans le cœur des êtres humains ordinaires. Dans le bouddhisme de Nichiren, c’est donc avant tout l’état de bouddha inhérent à tous les êtres qui est révéré.


Idée reçue n°3 : “Le bouddhisme, c’est savoir ‘rester zen’, éliminer ses désirs et cultiver le détachement.”

Si cette idée peut correspondre à certains enseignements bouddhistes, tous ne souscrivent pas à cette approche.

Dans la lignée du courant Mahayana (“grand véhicule”), le bouddhisme de Nichiren met en avant un mode de vie altruiste et engagé, et la transformation des désirs et des troubles plutôt que leur élimination. Cet enseignement nous encourage à réaliser concrètement nos aspirations et à surmonter toutes les difficultés de l’existence. Selon le principe appelé “les désirs mènent à l'illumination”, tout trouble, désir ou souffrance nous donne l’occasion de manifester notre état de bouddha, par la pratique de la récitation de Nam-myoho-renge-kyo.

Ainsi, les désirs et les troubles, loin d’être rejetés, sont le moyen de mettre en œuvre les enseignements bouddhiques ; ils servent de “combustible” indispensable sur la voie de l’Eveil. C’est pourquoi Nichiren écrit :

Maintenant, Nichiren et ceux qui récitent Nam-myoho-renge-kyo (…) brûlent le bois des désirs terrestres et contemplent la flamme de la sagesse illuminée.
OTT, 11.


Idée reçue n°4 : “Les bouddhistes sont de grands pessimistes, ils craignent de se réincarner et aspirent au nirvana.”

Cette idée a été accolée au bouddhisme de longue date et a malheureusement contribué à l’image déformée d’une religion qui abhorrerait l’existence terrestre... Elle prend son origine au XIXe siècle, chez les premiers penseurs occidentaux à s’intéresser au bouddhisme, tel Schopenhauer qui vanta le “pessimisme bouddhique”. Or il s’agit là d’une mauvaise interprétation, due aux connaissances parcellaires dont on disposait à l’époque. Le bouddhisme enseigne, au contraire, à épanouir tout son potentiel, cultiver un bonheur authentique et profiter pleinement de l’existence présente.

Néanmoins, il faut pour cela regarder en face la réalité de la vie humaine. C’est le constat qu’a dressé le Bouddha sous la forme des Quatre nobles vérités, dont la première est que “la vie est souffrance”. Pour autant, ce regard extrêmement rigoureux et lucide n’a de sens que parce qu’il existe un moyen efficace de surmonter cette souffrance – autrement dit, “quitter le cycle des souffrances de la naissance et de la mort”.

Dans le bouddhisme de Nichiren, cette victoire fondamentale peut s’obtenir dans cette existence-ci. La vie ordinaire, avec ses bonheurs et ses malheurs devient alors, en elle-même, une source de joie illimitée.


Idée reçue n°5 : “Le bouddhisme est fataliste, il enseigne le principe implacable du karma.”

Le bouddhisme a effectivement adopté la notion de karma, héritée de l’hindouisme, selon laquelle la vie est régie par une loi rigoureuse de cause et d’effet.

Néanmoins, il enseigne surtout comment s'en libérer, en mettant en œuvre une autre forme de causalité, plus profonde, celle de la Loi merveilleuse, Nam-myoho-renge-kyo.

On peut décrire cette Loi comme la neuvième conscience, la force de vie qui sous-tend et oriente la causalité karmique. En puisant dans cette énergie, une personne est capable d’éclairer sous un jour positif tous types de karma, et peut donner à sa vie une formidable impulsion vers le bonheur, pour soi et les autres. C’est le principe de “transformer le karma en mission”, enseignement d'un espoir illimité. Nichiren Daishonin écrit :

Ceux qui croient dans le Sûtra du Lotus vivent comme en hiver, mais l'hiver se transforme toujours en printemps. Jamais, depuis les temps anciens, personne n'a vu ni entendu dire que l'hiver s’était transformé en automne. De même, jamais nous n'avons entendu parler d'un croyant du Sûtra du Lotus qui se soit transformé en être ordinaire.
L'hiver se transforme toujours en printemps (Écrits, 539)

Loin d’encourager à la résignation, le but même du bouddhisme est d’opérer un changement de sa destinée en développant la force de défier toutes les formes d’adversité. En traversant victorieusement les épreuves de l’existence, non seulement nous “changeons l'hiver en printemps” dans notre vie, mais nous enrichissons notre humanité au cours de ce processus, devenant plus à même de comprendre, d'inspirer et de soutenir les autres.