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Le bouddhisme est un enseignement « vivant », qui a toujours su évoluer pour s’adapter aux époques, aux pays et aux personnes à qui il était destiné. Sa vocation est de toujours être accessible à tous.

Ainsi, le Bouddha Shakyamuni prêcha des doctrines diverses au cours de sa vie, afin d’amener graduellement son enseignement à la portée du plus grand nombre. Par la suite, dans la lignée du Sûtra du Lotus, le grand maître chinois Tientai Zhiyi (538-597) réforma les conceptions religieuses de son temps ; il établit une classification complète des différents enseignements du Bouddha et démontra la primauté du Sûtra du Lotus. De même, au XIIIe siècle, Nichiren oeuvra à renouveler le monde religieux de son temps et à le libérer de la confusion, du formalisme et de l'esprit de chapelle.

A notre époque, le mouvement bouddhiste Soka s'inscrit dans ce courant dynamique allant vers l'ouverture et la préoccupation pour les personnes ordinaires. Par exemple, la récitation des passages du Sûtra du Lotus, dans la pratique quotidienne de gongyo, fut écourtée en 2002, afin d'en faciliter la lecture pour tous, et s’adapter au mode de vie des pratiquants d’aujourd’hui.

Un enseignement égalitaire

L'essence du bouddhisme réside avant tout dans la foi des personnes qui le pratiquent – à travers les trois piliers que sont la foi, la pratique et l'étude. Il se définit comme une « voie intérieure », dont le but est de se changer soi-même – en étant en accord et à l'écoute de sa propre « voix » intérieure, son propre état de bouddha, et non pas en se conformant aveuglément à une pratique formelle « extérieure » à soi.

Ainsi, Nichiren Daishonin écrit :

Ne recherchez jamais aucun des enseignements de Shakyamuni, ni les bouddhas et bodhisattvas de l’univers, en dehors de vous-même.
Traité sur l’atteinte de la bouddhéité en cette vie

Tout part d'un changement intérieur. C’est la caractéristique de la démarche bouddhique, que le deuxième président du mouvement Soka au Japon, Josei Toda, traduisit par le concept de « révolution humaine ».

Le bouddhisme de Nichiren encourage ainsi à l’autonomie dans la foi et insiste sur le fait que seuls nos efforts personnels peuvent nous conduire au bonheur. Dans cette perspective, il ne saurait exister d’« intercesseurs » qui, seuls, détiendraient la sagesse bouddhique, ni de hiérarchie entre moines et laïcs.

Maintenir l'esprit religieux

La préoccupation centrale du mouvement bouddhiste Soka est de maintenir vivant « l'esprit religieux » présent au coeur du bouddhisme de Nichiren.

On pourrait définir cet esprit comme la force morale de croire que nous possédons la capacité de surmonter toutes les difficultés et impasses, quelles qu'elles soient. C'est ce qui permet de transformer le fatalisme en courage et le désespoir en espoir. Un tel esprit constitue la source vive de toutes les traditions religieuses.

A l'époque de Nichiren, les différentes écoles bouddhiques tendaient à perdre de vue ce point fondamental. Elles se querellaient continuellement entre elles, cherchant à accroître leur importance et à s'assurer l'appui du pouvoir politique, tombaient dans le formalisme et, finalement, s'éloignaient des personnes ordinaires. Face à cet état de fait, Nichiren a, au contraire, cherché à faire revivre « l'esprit religieux » du bouddhisme. En étudiant le Sûtra du Lotus sous l'angle des trois aspects « texte, principe, intention »1, il y découvrit des principes révolutionnaires qui pouvaient permettre à chaque personne de s'éveiller à sa nature de bouddha inhérente et instaura une pratique à la portée de tous, qui concrétise ces principes.

La séparation avec la Nichiren Shôshû

Le mouvement bouddhiste Soka était historiquement rattaché à l’école de la Nichiren Shôshû. En effet, au Japon, la Soka Gakkai regroupait originellement les fidèles laïcs des temples de cette école.

Cependant, à partir des années 50, certains membres du clergé ne voyaient pas d’un bon œil le développement et le dynamisme du mouvement Soka, et souhaitaient en prendre le contrôle. Ils insistaient sur le dogme, les rituels et l’existence d’une structure hiérarchique entre les moines et les laïcs, ce qui fut une source de graves tensions entre les deux groupes. Comme l’observe Karel Dobbelaere, sociologue des religions :

« Le conflit entre les laïcs et le clergé n’est pas typique du bouddhisme de Nichiren (…) Le clergé prétend monopoliser l’interprétation des textes sacrés et se définit comme gardien des écrits, des objets et des lieux saints, se basant entre autres sur la spécificité de sa formation et sur le caractère consacré de la mission qu’il a reçue. »2

Suite à ces divergences profondes, en 1991, le Grand Patriarche de la Nichiren Shôshû décida autoritairement d’excommunier l’ensemble des pratiquants du mouvement Soka, soit plusieurs millions de personnes à travers le monde.

La mission cultuelle du mouvement Soka

Il faut noter cependant que certains moines se sont, dès le début, ouvertement opposés à cette décision. Ils formèrent un groupe de moines dits « réformateurs », proche du mouvement Soka, qui œuvre jusqu’à présent à corriger les déviations doctrinales et l’autoritarisme régnant au sein du clergé de la Nichiren Shôshû.

En particulier, à partir de 1993, ce fut grâce au révérend Narita Sendo, supérieur du temple Jôen-ji, que les pratiquants du mouvement Soka ont pu continuer à recevoir l’objet de culte, (le Gohonzon) que la Nichiren Shôshû refusait de leur conférer.

Aujourd'hui, en France, des ministres du culte – correspondant à un clergé « séculier » – sont chargés de diriger les offices religieux et cérémonies cultuelles au sein du mouvement Soka. Ce sont des pratiquants expérimentés, dont la fonction particulière ne confère aucun statut privilégié.

En savoir plus :

Site des moines réformateurs de la Nichiren Shôshû : www.nichiren.com (en anglais)
L'historique de la séparation avec la Nichiren Shôshû : Réponses Soka

Bibliographie :
La Nichiren Shôshû, histoire d'une déviation, collectif, 1999, édité par l'ACEP.
La Soka Gakkai, un mouvement de laïcs de l’école bouddhiste de Nichiren devient une religion, K. Dobbelaere, 2001, Editions Elledici.

  • 1. Le « texte » désigne le sens littéral des mots du Sûtra. Le « principe » indique l'enseignement véhiculé par le sens littéral. Et l'« intention » définit le sens fondamental ou ultime, le but véritable qui sous-tend le principe. Voir D. Ikeda, Commentaires du traité pour ouvrir les yeux, vol.1, p.61.
  • 2. K. Dobbelaere, La Soka Gakkai, un mouvement de laïcs de l’école bouddhiste de Nichiren devient une religion, 2001, Editions Elledici, p.16.