Au mois de juin, nous aborderons le thème « Les bodhisattvas sortis de la terre ». Ce thème constitue une partie du programme de l’activité d’étude Niveau 2 qui se tiendra le 11 octobre prochain.

Nichiren et le Sûtra du Lotus

Dans le chapitre « Surgir de terre » du Sûtra du Lotus (le 15e), Shakyamuni appelle d’innombrables bodhisattvas dans l’intention de leur confier la propagation de son enseignement dans l’époque troublée qui suivra sa disparition. Comme le Sûtra les dépeint émergeant en grand nombre de sous la terre, on les a appelés les bodhisattvas sortis de la terre, et on considère qu’ils résident dans le monde de la vérité fondamentale.

Les bodhisattvas sortis de la terre sont innombrables, chacun étant à la tête d’une suite de disciples aussi nombreux que les grains de sable de soixante mille Gange, le plus grand fleuve sacré en Inde.

Ces bodhisattvas ont constamment été formés et encouragés par Shakyamuni depuis le passé infiniment lointain, et ont déjà adopté l’enseignement fondamental pour atteindre la bouddhéité. Comme ils possèdent en eux le même état d’éveil que Shakyamuni, ils se sont vu confier la mission de répandre largement la Loi merveilleuse dans la période confuse connue sous le nom d’époque de la Fin de la Loi.

Ils sont conduits par quatre bodhisattvas, Pratiques-Supérieures, Pratiques-Sans-Limites, Pratiques-Pures et Pratiques-Solidement-Établies. Dans le chapitre « Les pouvoirs surnaturels de l’Ainsi-Venu » (le 21e) du Sûtra du Lotus, Pratiques-Supérieures et tous les autres bodhisattvas font le serment de répandre la grande Loi après la disparition de Shakyamuni. En réponse à leur serment, Shakyamuni leur confie la propagation de son enseignement après sa mort, en les chargeant de transmettre la grande Loi à l’avenir.

À la lumière de ces passages du Sûtra, deux questions essentielles demeurent : à quel moment, après la disparition de Shakyamuni, apparaîtront les bodhisattvas sortis de la terre ? Et quelle est exactement la grande Loi qu’ils propageront alors ?

Nichiren Daishonin indique clairement que l’époque où les bodhisattvas sortis de la terre apparaîtront est l’époque de la Fin de la Loi, et la grande Loi qu’ils répandront est la Loi merveilleuse, ou Nam-myoho-renge-kyo. Nichiren réalisa lui-même les instructions données par Shakyamuni dans le Sûtra du Lotus à propos de la transmission de ses enseignements. En d’autres termes, c’est Nichiren qui est apparu au début de l’époque de la Fin de la Loi pour enseigner Nam-myoho-renge-kyo et le transmettre avec un dévouement altruiste. En ce sens, Nichiren est lui-même un bodhisattva sorti de la terre, et son rôle correspond plus particulièrement à celui de leur guide, le bodhisattva Pratiques-Supérieures.

Dans La réalité ultime de tous les phénomènes, Nichiren écrit :

« Quoi qu’il arrive, accomplissez des efforts dans la foi, faites-vous connaître comme un pratiquant du Sûtra du Lotus et restez mon disciple pour le restant de votre vie. Si vous avez le même esprit que Nichiren, vous devez être un bodhisattva sorti de la terre. Et si vous êtes un bodhisattva sorti de la terre, il n’y a pas le moindre doute que vous avez été disciple du bouddha Shakyamuni depuis le très lointain passé. » (Écrits, 389)

Ce passage explique que tous ceux qui acceptent et croient dans les enseignements de Nichiren, les propagent, et contribuent à la réalisation de kosen rufu sont sans exception des bodhisattvas sortis de la terre. Ces personnes sont des disciples authentiques de Nichiren Daishonin, le Bouddha de l’époque de la Fin de la Loi.


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Annexe

Extraits de La Sagesse du Sûtra du Lotus (non inclus dans le programme)

Extrait 1 : D’innombrables bodhisattvas sortent de terre

T. Endo. La transition de l’enseignement théorique (la première moitié du Sûtra du Lotus) à l’enseignement essentiel (la seconde moitié) constitue une véritable révolution. Car, tout ce qui, dans l’enseignement théorique, avait été jusqu’alors considéré comme vrai est totalement contredit. L’apparition des bodhisattvas sortis de la terre est ce qui déclenche ce bouleversement des idées reçues. [...]

D. Ikeda. La surprise, le choc, le doute sont les sentiments partagés par ceux qui avaient foi dans les enseignements antérieurs, qui croyaient à l’enseignement théorique du Sûtra du Lotus. « Ébranler les convictions », c’est brusquement détruire une conception du monde préexistante. C’est en bousculant des conceptions devenues familières et confortables que Shakyamuni révèle sa véritable identité et son authentique état de vie.

H. Suda. On a parfois décrit la philosophie comme le « produit de l’émerveillement »1, de la perplexité devant un grand mystère. [...]

D. Ikeda. D’un point de vue plus profond, on peut y voir une révolution spirituelle qui transforme radicalement la conception de la vie, du monde et de la société. En approfondissant le sens des chapitres « Surgir de Terre » (15e) et « Durée de la vie » (16e), nous pouvons y trouver un remède puissant, capable de guérir les maux de notre civilisation contemporaine, actuellement à la croisée des chemins. [...]


Extrait 2 : Un grand changement dans la conception du Bouddha

D. Ikeda. [...] Les principes exposés dans l’enseignement essentiel du Sûtra du Lotus provoquèrent un choc peut-être encore plus grand. C’est là qu’est révélé pour la première fois le principe de l’éternité de la vie du Bouddha dans les trois phases de la vie, passé, présent et futur. Cela constitue un grand changement, une modification fondamentale de tout l’enseignement dispensé jusqu’alors par Shakyamuni. C’est une révolution dans la façon de concevoir le Bouddha. [...] D. Ikeda. En effet. Le chapitre « Surgir de terre » brise la terre gelée de la résignation, l’idée que les choses sont ce qu’elles sont et qu’il n’y a rien à faire pour les changer. C’est une lutte pour révéler, dans le monde entier, les capacités contenues en l’être humain, l’impressionnante dignité de l’humanité et des personnes ordinaires. [...]

Les bodhisattvas sortant de la terre ne sont-ils pas la concrétisation même de cet état de vie qui ne fait qu’un avec le Bouddha ou avec l’univers ? Bien que nous les appelions des bodhisattvas, ce sont en réalité des bouddhas. D’où viennent-ils, ces bodhisattvas sortis de la terre ? Le grand maître chinois Tiantai disait qu’ils résident « dans les profondeurs ultimes de la vie, c’est-à-dire l’absolue réalité de l’être. »2

Autrement dit, ils représentent la vérité qui existe au plus profond de chaque vie, la Loi fondamentale de Nam-myoho-renge-kyo. Nam-myoho-renge-kyo est la source originelle de l’univers, la force fondamentale de la vie. C’est l’expression ultime de la sagesse, la base de tous les processus et principes. Les bodhisattvas sortis de la terre manifestent cette énergie. De plus, ils sont engagés dans la voie des bodhisattvas. Bodhisattva est une étape où l’on n’a pas encore obtenu la perfection (l’effet, la bouddhéité). C’est dans cet état d’imperfection que l’on crée la cause de la bouddhéité. Les bodhisattvas, bien qu’imparfaits, débordent de l’état de vie suprême et parfait (l’effet, la bouddhéité).

On pourrait expliquer cela en disant que, tout en goûtant l’état de vie d’une joie et d’une perfection sans limites (celui de la bouddhéité), un bodhisattva entreprend également d’agir, d’aller de l’avant, de s’élever encore plus haut et de conduire toujours plus de nouvelles personnes vers l’illumination. Autrement dit, ils sont dans un état « d’imperfection parfaite ».

Les bodhisattvas sortis de la terre sont ceux qui ne cessent jamais d’agir, en s’appuyant sur la Loi merveilleuse. Faire jaillir cette énergie dans sa propre vie, c’est faire apparaître les bodhisattvas sortis de la terre dans notre être. Lorsque nous le faisons, nous parvenons à briser la coquille du petit moi qui a toujours jusqu’alors emprisonné notre vie.

(Daisaku Ikeda, La Sagesse du Sûtra du Lotus, vol. 1, chapitre 23, Acep)


A lire dans le numéro de Valeurs humaines du mois de mai 2020.
Valeurs humaines est le mensuel des associations Soka du bouddhisme de Nichiren. Abonnement / Achat au numéro


  • 1. Bloomsbury Thematic Dictionary of Quotations, London, Bloomsbury Publishing Limited, 1988, p. 291.
  • 2. Hokke Mongu (Commentaire textuel du Sûtra du Lotus), vol. 9.